Civ. 1re, 1er déc. 2021, n° 20-10.956

Un litige opposait deux ex-époux au sujet du règlement de la liquidation de leur régime matrimonial de communauté réduite aux acquêts. Avant le mariage, l’épouse avait souscrit deux emprunts pour financer une construction immobilière destinée à devenir sa résidence principale. Une partie des échéances était remboursée mensuellement au moyen du versement par la caisse d’allocations familiales à l’organisme prêteur d’une allocation personnalisée au logement (APL). Après la célébration du mariage, l’immeuble est demeuré un bien propre de l’épouse (en application de l’article 1405 du code civil) et le remboursement du prêt s’est poursuivi selon les mêmes modalités : une partie au moyen de ses revenus et une autre par le versement direct de l’APL au prêteur. S’est alors posée la question d’un éventuel droit à récompense pour la communauté. Fallait-il déduire du montant de la récompense la partie du prêt remboursée au moyen de l’APL ? Le remboursement par l’APL, versée directement au prêteur, générait-il un droit à récompense pour la communauté ?

 

 

 

 

 

 

La Cour de cassation juge que l’APL accordée à l’acquéreur d’un bien affecté à sa résidence principale, selon la composition et les ressources de son foyer, constitue pour son bénéficiaire un substitut de revenus. Dès lors, celle-ci entre en communauté, peu important qu’elle soit versée directement à l’organisme prêteur. En outre, l’APL ne pouvait être soustraite de la récompense due à la communauté au titre de la fraction en capital des échéances dont celle-ci s’était acquittée.

 

 

 

Les ex-époux se querellaient par ailleurs à propos du remboursement d’un emprunt pour l’acquisition d’un véhicule pendant le mariage. Cet acquêt de communauté avait été attribué en propre à l’époux au titre d’une convention datée du 20 mars 1998. Or l’acquisition avait été financée par un emprunt remboursé sous l’empire de la communauté. La communauté bénéficiait-elle, à ce titre, d’un droit à récompense ?

 

 

 

Selon la cour d’appel, tel n’était pas le cas : ce bien propre n’avait pas été payé au moyen de deniers communs, mais financé grâce à un prêt pour lequel l’époux avait contracté une assurance et dont il a réglé les échéances. Ce raisonnement est toutefois censuré par la première chambre civile. Cette dernière souligne qu’il ne suffit pas d’établir que le prêt a été souscrit et remboursé par l’un des époux : il faut prouver que le paiement s’est réalisé au moyen de deniers propres. Or, en vertu de l’article 1402, alinéa 1er, du code civil, « tout bien, meuble ou immeuble, est réputé acquêt de communauté si l’on ne prouve qu’il est propre à l’un des époux par application d’une disposition de la loi ». Ainsi, les sommes employées pour le remboursement de l’emprunt destiné à l’acquisition du bien propre étaient présumées communes. La cour d’appel aurait donc dû rechercher la nature propre ou commune des fonds employés au paiement des échéances durant le mariage.

 

 

 

 

 

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