Civ. 1re, 30 juin 2021, n° 19-22.787

Une femme victime d’un AVC a dû bénéficier de l’implantation d’un stimulateur cardiaque, puis a subi un drainage péricardique. Celui-ci a entraîné des complications, causant chez la patiente un taux d’incapacité permanente partielle de 90 %. Aussi a-t-elle saisi d’une demande d’indemnisation la commission régionale de conciliation et d’indemnisation des accidents médicaux, laquelle a estimé que l’indemnisation des préjudices devait être mise à la charge de la solidarité nationale sur le fondement de l’article L. 1142-1, II, du code de la santé publique. La victime étant décédée par la suite, ses proches ont poursuivi la demande en indemnisation. Soutenant que le décès de leur épouse et mère était consécutif à l’accident médical non fautif grave dont elle a été victime, ils ont assigné en indemnisation l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (l’ONIAM).

La cour d’appel de Paris a condamné l’ONIAM au paiement de diverses indemnités, dont une rente viagère au titre du préjudice économique subi par le mari de la victime en raison de la privation de l’assistance bénévole fournie par son épouse, ainsi que la somme de 5 000 € au titre de son préjudice sexuel subi par ricochet. Ceux-ci constituent-ils toutefois des préjudices ouvrant droit à réparation par la solidarité nationale ?

La Cour de cassation répond, d’une part, que la perte, pour le veuf, de l’assistance quotidienne de son épouse dans les tâches ménagères consécutive du décès de celle-ci constitue bien un préjudice économique indemnisable au titre de la solidarité nationale.

La Cour énonce toutefois, d’autre part, que le préjudice sexuel peut être éprouvé par ricochet par le conjoint de la victime directe, mais qu’il convient de distinguer deux hypothèses : celle du préjudice éprouvé du vivant de la victime directe et celle du préjudice éprouvé à la suite du décès de cette dernière. Les hauts magistrats rappellent ainsi que dans le premier cas, aucune réparation n’est due au titre de la solidarité nationale. Le préjudice sexuel de la victime par ricochet n’est indemnisable qu’en cas de décès de la victime directe et il doit alors se rattacher au préjudice d’affection de la victime par ricochet. Autrement dit, le préjudice sexuel de l’époux consécutif au décès de la victime directe ne peut être indemnisé de manière autonome. En l’espèce, l’époux ayant également obtenu une indemnisation au titre du préjudice d’affection, une telle indemnisation de son préjudice sexuel est donc exclue, car elle ferait courir le risque d’une double indemnisation contraire au principe de réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime.

Auteur : Éditions Dalloz – Tous droits réservés.