CE 7 oct. 2022, n° 443826, Association Anticor

Par un arrêt rendu le 7 octobre 2022 à propos de la communication des comptes annuels d’une fondation d’entreprise n’ayant reçu aucune subvention publique, le Conseil d’État réaffirme sa jurisprudence selon laquelle les personnes morales disposent d’une vie privée.

L’association de lutte contre la corruption Anticor avait demandé au tribunal administratif de Paris d’ordonner au préfet de Paris et de région Île-de-France de lui communiquer certains comptes annuels de la Fondation Louis Vuitton. Le tribunal a refusé de faire droit à cette demande au motif que la Fondation n’avait reçu aucune subvention publique et que, dès lors, aucun texte ne permettait une telle communication à un tiers. L’association Anticor s’est donc pourvue en cassation. S’est alors posée la question de l’interprétation et de la combinaison des articles L. 300-2, L. 311-6 et L. 311-7 du code des relations entre le public et l’administration : visent-ils également les personnes morales lorsqu’ils interdisent la communication, à une autre personne qu’à l’intéressé, des documents administratifs transmis ?

Selon le Conseil d’État, ces dispositions « doivent être entendues, s’agissant de leur application aux personnes morales de droit privé, comme excluant en principe sous réserve qu’elle ne soit pas imposée ou impliquée par d’autres dispositions, la communication à des tiers, par l’autorité administrative qui les détient, des documents relatifs notamment à leur fonctionnement interne et à leur situation financière ». Cette communication porterait atteinte à la protection de la vie privée de ces personnes morales, indique le Conseil qui confirme ainsi sa divergence avec la Cour de cassation (laquelle considère que seules les personnes physiques peuvent se prévaloir d’une atteinte à la vie privée au sens de l’article 9 du code civil).

Les hauts magistrats précisent qu’en particulier, « les comptes des fondations n’ayant reçu aucune subvention publique, qui relèvent de la vie privée de ces organismes […], ne sont, en l’absence de disposition législative le prévoyant expressément, pas communicables aux tiers ».

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