Civ. 1re, 12 oct. 2022, n° 21-11.408

Dans l’arrêt rapporté, la Cour de cassation indique que le testament mystique remis à un notaire par une testatrice en train de devenir aveugle doit être annulé et ne peut être converti en la forme internationale, s’il n’est pas démontré que l’intéressée pouvait lire ledit document.

Une personne atteinte d’une maladie neurodégénérative entraînant une cécité progressive avait remis à un notaire, en présence de deux témoins, un testament mystique dactylographié et signé désignant un légataire universel. Dans l’acte de suscription, le notaire avait mentionné que le testament mystique lui avait été remis par « le testateur » qui avait déclaré lui présenter son testament et affirmé en avoir personnellement vérifié le libellé « par la lecture qu’“il” en avait été effectué ». La testatrice fut par la suite placée sous tutelle puis décéda, laissant ses frères et sœurs pour lui succéder.

Ceux-ci assignèrent le légataire universel en nullité du testament sur le fondement de l’article 978 du code civil, arguant notamment de l’affection dont souffrait la testatrice au moment de la rédaction du testament. Ce texte dispose effectivement que « ceux qui ne savent ou ne peuvent lire ne pourront faire de dispositions dans la forme du testament mystique ». Le défendeur contesta toutefois cet argument et formula une demande reconventionnelle de conversion par réduction du testament mystique en testament en la forme internationale.

Les juges font droit à la demande en nullité et rejettent la demande de conversion par réduction. En effet, l’acuité visuelle de la testatrice ne lui permettait pas de lire les caractères dactylographiés, de taille normale, du document qu’elle avait présenté au notaire comme son testament. De plus, aucun élément de l’acte lui-même ou de l’acte de suscription n’éclairait sur le procédé technique qui aurait pu permettre à la testatrice de lire son testament. Autrement dit, la testatrice n’avait pas été en mesure de déclarer que ce document était son testament et qu’elle en connaissait le contenu, puisqu’elle était dans l’incapacité de lire seule et que rien ne démontrait qu’elle avait été aidée dans la lecture.

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