CJUE 7 avr. 2022, aff. C-645/20

Un Français s’installe au Royaume-Uni en 1981, où il épouse une ressortissante britannique. En 2012, il revient vivre en France auprès de l’un de ses trois enfants nés d’une première union et y décède en 2015. À la suite de l’ouverture de la succession, un litige s’élève entre l’épouse et ces enfants, qui saisissent un juge français d’une demande de désignation d’un mandataire successoral chargé d’administrer l’ensemble de la succession, en application du règlement n° 650/2012 du Parlement européen et du Conseil du 4 juillet 2012, non applicable au Royaume-Uni.

La cour d’appel se déclare toutefois incompétente, au motif que la dernière résidence habituelle du défunt se trouvait au Royaume-Uni. L’article 4 du règlement dispose en effet que « sont compétentes pour statuer sur l’ensemble d’une succession les juridictions de l’État membre dans lequel le défunt avait sa résidence habituelle au moment de son décès ».

Se pose alors la question de la mise en œuvre de l’article 10, § 1, a, aux termes duquel lorsque la résidence habituelle du défunt au moment du décès n’est pas située dans un État membre, les juridictions de l’État membre dans lequel sont situés des biens successoraux sont néanmoins compétentes pour statuer sur l’ensemble de la succession dans la mesure où le défunt possédait la nationalité de cet État membre au moment du décès. En l’occurrence, le défunt était français et sa succession comportait des biens en France. Simplement, aucune partie n’a invoqué l’application de cet article 10. Dès lors, le juge français, après avoir constaté que sa compétence ne pouvait pas être fondée sur l’article 4, avait-il l’obligation d’appliquer d’office l’article 10 ?

La Cour de justice de l’Union européenne répond par l’affirmative. Elle explique que l’article 10, § 1, a, « doit être interprété en ce sens qu’une juridiction d’un État membre doit relever d’office sa compétence au titre de la règle de compétence subsidiaire prévue à cette disposition lorsque, ayant été saisie sur le fondement de la règle de compétence générale établie à l’article 4 de ce règlement, elle constate qu’elle n’est pas compétente au titre de cette dernière disposition ».

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