Civ. 3e, 9 sept. 2021, n° 20-14.189

Si la renonciation tacite à un droit est en principe admise en jurisprudence, elle est toutefois écartée lorsque l’acte créateur du droit abdiqué prévoit des modalités particulières pour son exercice. Un arrêt rendu le 9 septembre dernier en fournit une illustration.

En l’espèce, la venderesse d’un immeuble s’était réservée un droit d’usage et d’habitation viager. Une clause du contrat de vente stipulait qu’elle aurait la faculté de renoncer « à toute époque, au droit d’usage et d’habitation présentement réservé à [son] profit et d’abandonner la jouissance du bien à l’acquéreur en prévenant ce dernier de [son] intention à cet égard, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, envoyée six mois à l’avance ». La venderesse prit le logement à bail huit ans plus tard et s’acquitta du loyer pendant quatre ans. Puis, confrontée à des difficultés de paiement, elle sollicita un délai pour apurer l’arriéré et, postérieurement, assigna l’acquéreur en annulation du bail et en remboursement du loyer.

Ses demandes sont rejetées par la cour d’appel au motif que l’ensemble de ses actes – la conclusion du bail, le paiement du loyer et la reconnaissance de la dette locative - établissent de façon certaine et non équivoque sa volonté de renoncer au droit d’usage et d’habitation. La Cour de cassation s’oppose à ce raisonnement, indiquant que « si la loi des parties fixe les modalités selon lesquelles la renonciation à un droit qu’elle prévoit peut intervenir, cette renonciation ne peut résulter que du respect du formalisme ainsi prévu ». Or, en l’occurrence, la renonciation n’est pas intervenue dans les formes prévues par l’acte de vente. La venderesse ne pouvait donc être considérée comme ayant renoncé à son droit d’usage et d’habitation.

Auteur : Éditions Dalloz – Tous droits réservés.